Education : un art en action

Education : un art en action

L’éducation, bien que souvent relayée au second plan par les politiques, est absolument centrale dans nos sociétés et ce n’est pas un hasard si je l’ai choisie comme thématique phare dans mon projet MétamorFaiseurs.

L’éducation, ce n’est pas seulement les écoles, l’instruction scolaire, la formation. L’éducation est partout et englobe toutes les étapes de notre vie.

Savoirs, savoir-faire, savoir-être, savoir-vivre, c’est un ensemble de connaissances mais pas seulement, c’est un ensemble de réalités qui nous donne les clés d’un vivre ensemble, d’un futur durable et qui nous permet de devenir un citoyen autonome, sensibilisé aux enjeux contemporains. C’est un art à part entière, un concept, une vision.

Dessine-moi une école

L’acquisition des savoirs élémentaires est importante. C’est un socle fondamental qui permet le développement de l’individu, de nous élever au rang d’êtres libres. L’accès à la scolarisation ou plus largement à l’instruction soulève inévitablement la question de l’égalité des chances et de l’insertion sociale.

Si nous devions inventer l’école de demain, quel type d’école voudrions-nous pour nos enfants et nous-mêmes en tant qu’adultes désireux d’apprendre tout au long de notre vie ?

 

A bonne école

Ecoles entre les murs, écoles d’infortune, busschools… différentes possibilités se développent pour répondre aux différentes situations. Dans certains pays, le simple accès au savoir élémentaire est compliqué, dans d’autres, on peine à moderniser le système et on laisse de côté ceux qui ne suivent pas ou ceux qui ne s’adaptent pas.

Si en France on peut se féliciter d’écoles publiques gratuites, le système est néanmoins vieillissant et montre certains dysfonctionnements. L’école est une institution quasi sacrée, que l’on a du mal à réformer. Si des expériences intéressantes voient le jour, il semble difficile de les généraliser et l’expérience éducative reste donc très fluctuante d’un endroit à un autre, d’un professeur à un autre, et inévitablement d’un enfant à un autre.

A l’heure du digital et du collaboratif, la façon de faire la classe doit également évoluer. Le numérique peut être une fin et un moyen. Certaines pratiques montrent d’ailleurs des résultats intéressants comme la classe inversée.

Cas d’école

Pour ceux qui ne rentrent pas dans le moule, l’expérience est souvent douloureuse et le système classique reste bien souvent impuissant. Certains professeurs pourtant très impliqués vous diront à quel point il est difficile de gérer au cas par cas et de trouver une solution pour aider les élèves en souffrance.

Ne pas en faire un cas d’école mais pourtant c’est à mon sens l’un des problèmes majeurs de l’éducation en France aujourd’hui : laisser sur le banc une partie des enfants. 

Des modèles alternatifs existent pour tenter de résoudre le problème : écoles démocratiques, écoles du 3e type, écoles Montessori… Toutes ces écoles apportent un autre éclairage, une autre façon de concevoir l’éducation : auto-gestion, autonomie de l’enfant, apprentissage informel, expérience individuelle et collective. Ces écoles sont souvent néanmoins couteuses et restent donc l’apanage d’une certaine catégorie de population.

École de la vie

Finalement est-ce que la vie ne serait pas le terrain d’école par excellence ? On parle bien d’école de la vie. On apprend de nos expériences, de nos envies. On apprend et l’on grandit continuellement, tout au long de celle-ci.

Pour certains, une alternative aux écoles réside d’ailleurs dans la non-scolarisation. Alors que dans certains pays, on parle de non-scolarisation pour un phénomène subi dû à un manque d’argent, un manque d’infrastructure ; dans d’autres c’est un choix des parents, un modèle d’éducation à part entière.

La non-scolarisation est différente de l’enseignement à domicile, en anglais la différenciation est d’ailleurs plus palpable (unschooling / homeschooling). Il s’agit d’être libre d’apprendre autrement. Comme l’expliquait Mary Griffith dans son livre The Unschooling Handbook, la non-scolarisation est « une façon de designer l’apprentissage aux besoins spécifiques de chaque enfant et chaque famille ».

J’ai récemment regardé le documentaire réalisé par Clara Bellar. Intitulé Etre et Devenir, ce film chamboule, émeut, perturbe… Bref, il ne laisse pas indifférent et questionne nos certitudes. Entre lâcher prise et engagement, c’est un projet de vie global. Ce n’est peut-être pas la solution miracle et cela n’est peut-être pas adapté à chacun mais cela mérite à minima de s’y intéresser.

L’art d’éduquer

Qu’on aie ou non la possibilité, la chance d’aller à l’école, l’éducation va bien au delà. Faculté à apprendre, façon d’éduquer ! L’éducation est tout un art, un art subtil dont il faut user avec finesse et justesse tel un funambule.

 

Former ou formater ?

Qu’est-ce qu’éduquer ? Est-ce que c’est délivrer ou ingurgiter un maximum de savoirs ? Est-ce que c’est former des esprits encyclopédiques ou des esprits critiques ? Le fameux dilemme entre la tête bien faîte et la tête bien pleine.

Il y a là certainement différentes écoles de pensées. Et si justement la mission première de l’éducation ce n’était pas de donner les clés pour réfléchir par soi-même, nous enseigner non pas la déformation professionnelle mais plutôt à déformater nos pensées, à questionner nos certitudes.

Eduquer c’est une arme contre la propagande, le conditionnement, la reproduction des stéréotypes. Alors comment enseigner et apprendre avec partialité et neutralité  ?

« L’école devrait toujours avoir pour but de donner à ses élèves une personnalité harmonieuse, et non de les former en spécialiste. » proclamait haut et fort Albert Einstein.

On parlait des enfants qui ne rentrent pas dans le moule de l’éducation classique mais cela pourrait s’avérer être une réelle chance car à trop vouloir être dans le moule, on finit par ressembler à une tarte.

Faire Faire / Apprendre à apprendre

Au fil de mon expérience et des rencontres que j’ai pu faire, un élément central est ressorti : l’action. Il semble primordial de recentrer l’enfant ou l’apprenant au cœur du processus. En d’autres termes lui laisser la possibilité d’être acteur de son apprentissage, pilote de sa destinée.

L’apprentissage par l’action : un précepte vieux comme le monde, « c’est en forgeant que l’on devient forgeron ». C’est en faisant, en expérimentant que l’on apprend. De plus en plus de Maker spaces, de Fab Labs voient le jour pour nous aider à expérimenter et à créer.

Apprendre par cœur n’a pas d’intérêt en tant que tel, puisque si on n’est pas confronté à ce que l’on apprend, toutes ces connaissances tomberont rapidement dans un abîme profond. C’est le concept du bachotage : ingurgiter un tas de connaissances qui ne serviront qu’à donner le change le temps d’un examen.

Finalement on pourrait parler aussi de l’art de s’éduquer. C’est un des principes revendiqués par les défenseurs de la non-scolarisation et les écoles démocratiques mais c’est quelque chose qui est applicable dans tous les modèles et qui est fondamental. C’est responsabiliser l’enfant, l’individu, le citoyen et laisser libre court à la créativité.

Vivre ensemble : A la rencontre de soi et des autres

Éduquer c’est également l’accompagnement dans l’ouverture aux autres et à nous-mêmes.

Savoir qui l’on est… pour mieux savoir-être et savoir-vivre en société dans le respect de chacun. En d’autres termes, avoir les clés pour devenir un citoyen responsable et être sensibilisés aux enjeux contemporains.

A cet égard, j’aimerais citer Paul Apivat Hanvongse, Directeur produits chez Learn Education en Thaïlande. « Confucius said « I hear and I forget, I see and I remember, I do and I understand » and I will add to that I impact and then I learn. The best way to learn about something or about someone is to try to change and to make impact. »

Au cours de mon voyage entrepreneurial, j’ai pu voir beaucoup d’initiatives qui font rimer éducation avec sensibilisation et engagement citoyen. JIF Afrique et Voix des Jeunes au Sénégal (pour plus de détails, retrouvez cet article qui parle de ces deux initiatives), ou encore Green N Kool à Madagascar ont tous une préoccupation majeure : engager et former la jeunesse aujourd’hui aux valeurs sociétales et environnementales pour un meilleur avenir demain.

L’éducation par l’art

Certains parlent d’art pour l’art mais je pense que l’art a bien souvent un sens figuré, une mission cachée ou non, voire même un rôle à jouer. Je parlerais donc ici d’art pour l’éducation, d’art comme outil puissant de sensibilisation et d’intégration sociale.

 

Médiation culturelle, médication artistique

André Maurois le disait « L’art est un effort pour créer, à côté du monde réel, un monde plus humain. » L’art dépeint une situation idéalisée, sublimée, fantasmée. L’art sert à inspirer, à émouvoir, à transporter mais il sert aussi à sensibiliser, à dénoncer et à engager.

L’objet artistique permet une certaine distance et de ce fait une critique, une prise de conscience plus grande. C’est tout le pouvoir de l’art !

Encore une fois mon voyage m’a permis de découvrir de très beaux exemples. J’ai déjà parlé sur ce site de l’incroyable artiste Chuu Wai Nyein. Une jeune birmane qui dénonce la situation des femmes au Myanmar grâce à des tableaux absolument sublimes et poignants. Elle met en avant des femmes fortes et indépendantes. (Retrouvez plus de détails dans cet article.)

A Madagascar, j’ai fait la rencontre de Caylah, jeune poète talentueuse. Dans ses slams, elle pointe du doigt les problèmes de sa société et s’engage notamment pour la cause des femmes. Elle a inventé le concept de la « slamothérapie » et aide les personnes défavorisées à avoir plus de confiance en elles et à « soigner leurs maux par les mots ».

Des artistes engagés, il y en a à l’appel. Ces deux femmes, dans des arts très différents, prennent part au combat et nous touchent en plein cœur. L’art questionne notre rôle en tant que spectateur et nous invite à devenir acteur.

Art de vivre ou (re)vivre dans l’art ?

Et si on arrivait à allier les deux : utiliser l’art pour fédérer une communauté et permettre de vivre en harmonie avec la nature et les autres.

C’était en quelque sorte l’objectif de Julia pour lElephant Crossing Hotel à Vang Vieng (Laos). Cette artiste canadienne a élaboré une fresque murale avec les enfants de la ville. Tout en étant sensibilisés aux problématiques environnementales, les élèves ont pris part à la réalisation de la peinture, laquelle représente avec brio la magnifique ville de Vang Vieng : ses montgolfières, ses, montagnes, sa rivière, ses poissons.

L’art sous toutes ses formes est un incroyable moyen de tisser du lien social et joue un rôle capital dans la (ré)insertion. Revivre ou renaître grâce à l’art car l’art permet de former, de donner du sens, de redonner confiance et espoir à des personnes qui n’en ont plus. Il leur ouvre de nouvelles perspectives et le champs des possibles est infini.

Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si une compagnie de cirque s’est nommée L’Aléa des possibles. Elle prône l’intégration par l’art et la transmission interculturelle et interdisciplinaire à Madagascar et se dote d’une mission sociétale inouïe.

Au final, l’éducation est à la croisée des savoirs et de la vie. L’éducation : un art secret, une arme massive qui peut faire des dégâts si elle est mal utilisée mais qui peut faire des miracles si on appuie sur les bonnes valeurs et si on utilise les bonnes « méthodes ».

Passionnée d’écriture et de voyage, de découverte et de partage, Morgane aime apprendre et explorer en permanence, découvrir de nouvelles cultures, de nouveaux espaces, de nouvelles façons de réinventer le monde qui nous entoure. Résolument curieuse, elle s’intéresse à des sujets très variés, allant de la culture à l’innovation, en passant par les ressources humaines et l’entrepreneuriat. Ancienne étudiante en histoire du genre, Morgane a toujours porté un regard particulier aux problématiques hommes/femmes. Tombée dans le Web autour d’un (heureux) hasard, la toile s’avère être un fabuleux espace de fouille, de recherche, d’échange et de créativité rendant possible une mutation des genres et des pratiques socio-culturelles. Informer, surprendre, enchanter, créer, co-créer… à l’heure de l’Open source, de l’économie collaborative, le champ des possibles est infiniment grand. Un tantinet aventurière, Morgane aime relever des défis et se dépasser. Avec son projet MétamorFaiseurs, elle est partie à la rencontre d'ambassadeurs du changement dans le monde autour de l'éducation, l'égalité homme/femme et l'environnement et se lance dans la réalisation d'un webdocumentaire. MétamorFaiseurs : un monde en mutation, des Faiseurs en action !