Ecole de demain

MétamorFaiseurs en Thaïlande : L’école de demain

Le système éducatif thaïlandais a été pas mal pointé du doigt ces dernières années et la dernière enquête PISA 2015 de l’OCDE ne lui donne pas meilleure presse. Elle place la Thaïlande au rang de 55 sur 70 (En savoir plus sur les résultats de la Thaïlande). Cette enquête est menée tous les trois ans auprès de jeunes de 15 ans dans les 34 pays membres de l’OCDE et dans de nombreux pays partenaires. 

Bangkok

Alors que le pays est la deuxième économie d’Asie du Sud-Est et que plus d’un quart de ses jeunes sont diplômés de l’enseignement secondaire, ces mauvaises notes questionnent et alertent sur la nécessité de réformer le système.

La Thaïlande dispose d’un système à plusieurs vitesses. L’expérience éducative est totalement inégale. Les bonnes écoles se trouvent principalement à Bangkok tandis que les zones rurales peinent à avoir des professeurs qualifiés et sont complètement laissées pour compte.

La pédagogie du par coeur, du copier-coller semble également remise en cause et ne permet pas aux élèves de questionner les choses ni de les appliquer dans des cas concrets.

Une école égalitaire où le savoir serait accessible à tous, où l’égalité des chances seraient réellement de mise. Une école guidée par l’expérimentation, la mise en pratique. Mais une école de demain qui prendrait également le temps de vivre au présent. Est-ce que ce ne serait pas ça les enjeux de l’éducation en Thaïlande, comme dans bien d’autres pays ?

L’école sans frontière

Numérique, outil de démocratisation ?

Numérique et démocratisationLa Thaïlande investit de plus en plus dans le domaine de l’Edtech pour à la fois permettre un enseignement de meilleur qualité et en même temps réduire les inégalités.

Le numérique est souvent vu comme un outil puissant de démocratisation et de réduction des inégalités. En effet, grâce aux nouvelles technologies, le savoir peut être véhiculé beaucoup plus largement et facilement. N’importe qui peut avoir accès à une multitudes d’informations et de formations. N’importe qui ? Non pas exactement car finalement si ce n’est pas bien accompagné, cela reste l’apanage de certains autodidactes et c’est d’ailleurs en ça que le Blended learning est intéressant.

De plus cela suppose un accès égal à internet et aux nouvelles technologies et si la Thaïlande est plutôt connue pour son wifi accessible presque partout et son bon taux d’adoption des smartphones, il n’en reste pas moins que certains villages, certaines populations restent mises à l’écart et l’écart ne fait que se creuser et s’amplifie même par le biais des technologies. En ce sens, le numérique peut alors devenir un vecteur puissant d’inégalités.

Si l’intelligence artificielle, la réalité virtuelle peuvent sans conteste offrir une expérience éducative intéressante et que le système éducatif a tout intérêt à se moderniser en utilisant les nouvelles possibilités du numérique, il ne faut pas négliger la question de l’égalité des chances, pas moins que celle de la reproduction des stéréotypes, qui demeurent un véritable objectif.

L’anglais, pilier du développement

Anglais comme pilier de développementComme partout dans le monde, l’anglais représente un réel enjeux dans l’éducation et plus largement dans le développement du pays. Incontestablement liés à la mondialisation et au tourisme, cette langue est devenue un apprentissage fondamental. Veritable pilier du développement, l’anglais cristallise l’attention.

Pourtant, le niveau de maîtrise de l’anglais des Thaïlandais reste étonnamment très bas. Une enquête réalisée en 2016 par la société de formations linguistiques EF (Education First), place la Thaïlande au rang de 56 sur 72.

A l’école, les méthodes pédagogiques ne favorisent pas l’expression orale des élèves et les enseignants bien formés sont difficiles à trouver, surtout en zone rurale. Pour contrebalancer et rattraper les failles du système, de nombreuses associations sont créées localement ou plus globalement pour tenter d’améliorer l’apprentissage de la langue. On le voit d’ailleurs aisément dans les offres de volontariat, les cours d’anglais sont parmi les demandes les plus recherchées.

C’est comme ça que j’ai fait la rencontre de Jin, qui a développé un programme d’apprentissage de l’anglais. Avec GEE (Gain English Easily), elle sillonne les routes de Thaïlande et offre ses services pour « pimper » et optimiser les cours d’anglais. « Learn a new language and get a new soul », tel est son objectif. Elle enseigne l’anglais par le biais d’activités ludiques et fun, comme la cuisine, les expériences scientifiques, les activités manuelles… Et elle l’a bien compris, l’action il n’y a que ça de vrai.

Ecole en action et école de pensée

Un apprentissage par l’action

Apprentissage par l'actionJ’en ai déjà parlé dans mon article Education : un art en action, l’apprentissage par l’action, par l’expérimentation est le meilleur moyen d’apprendre. Il a toujours existé c’est vrai mais on l’avait un peu oublié au profit d’un bachotage extrême. Et je le disais dans l’introduction, la Thaïlande est championne dans l’apprentissage du par coeur.

Néanmoins, de plus en plus de FabLabs, de makerspaces voient le jour et le DIY tente de s’imposer comme un nouveau modèle pédagogique.

A ce sujet, j’ai rencontré le fondateur de TamDai.net : Paritas Chaijarernwana, lors du festival Bangkok Mini Maker Faire. Cette plateforme dont le nom signifie « Can Do » met en avant le DIY et promeut une communauté de makers. Le but : partager des savoir-faire et inciter les personnes à expérimenter par eux-mêmes car « anyone CAN DO in anywhere and anytime ». Les disciplines sont variées comme l’électronique,  la robotique, la couture, la cuisine… On encourage ainsi l’expérimentation, la création, la co-création… la proaction dans l’action.

On assiste tout doucement à un déplacement du maître « tout puissant » à un élève acteur de son apprentissage. Et c’est le message que veut transmettre Learn Education. Paul Apitvat Hanvongse, son directeur en développement de nouveaux produits, me confiait que le but de l’école c’est de valoriser et responsabiliser les élèves, de les rendre acteur de leur apprentissage et de leur avenir. En somme, leur permettre d’apprendre à lire pour lire à apprendre et leur permettre de se construire leur propre case.

L’école de demain se conjugue au présent

MindfulfarmAlors qu’on prône la performance, le rendement, l’esprit de compétition et qu’on oublie le stress, les burn-outs, les boring-outs qui leur sont souvent associés, il semble important de revenir à l’essentiel : le temps. Incompressible mais pourtant il file à une vitesse de la lumière.

Courir après le temps, le laisser filer, rattraper le temps perdu… le temps nous échappe et pourtant, il ne tient qu’à nous de vivre, de savourer le moment présent. Prendre le temps de prendre le temps, prendre le temps de perdre son temps et être conscient du moment présent.

Et l’école devrait aussi préparer à cela. Prendre du temps pour soi, pour se recentrer sur soi, sur ses désirs, sur ses aspirations. Dans un pays comme la Thaïlande, cela fait particulièrement sens mais c’est, à mon sens, à transposer partout dans le monde.

Durant mon séjour, j’ai eu la chance de passer une semaine à la Mindfulfarm, une expérience incroyable. Pi Nan, son fondateur est un ancien moine, il a pu me livrer un autre regard sur le monde. Pour lui, « La conscience du moment présent amène la sagesse et la sagesse amène la liberté ». Il m’a parlé de l’éducation de la vie : la vraie école c’est notre planète, c’est la nature. On parque les enfants dans des boxes que l’on appelle des écoles pour nous faire apprendre mais on oublie que la vie, la nature sont d’excellents terrains d’apprentissage. Cela m’a d’ailleurs fait penser aux écoles alternatives ou plutôt à la non scolarisation qui prônent comme fer de lance l’école de la vie.

La médiation, le yoga peuvent être de bons apports dans l’éducation, à la fois utilisés comme outils pour les enseignants pour les aider à gérer leur cours de façon plus sereine ou que ce soit comme discipline ou méthode à intégrer dans un parcours global.

Trouver l’équilibre entre les attentes des sociétés modernes et ses aspirations propres, disposer des outils et d’un accompagnement pour permettre à tous de devenir acteur de sa formation et de son futur tels devraient être les enjeux de l’éducation.

Et dès lors que l’accès aux outils est garanti, ce qu’il y a de bien avec l’éducation, c’est qu’il n’y a pas de fin, pas de frontière, pas de limite. La seule limite c’est celle que l’on veut bien se fixer. Pour citer Kittikawin Cheecharem, un spécialiste de l’Edtech rencontré à Bangkok : « Learning is a continual process, people don’t stop growing, don’t stop learning. It’s something we pursue for the rest of our life”.

Passionnée d’écriture et de voyage, de découverte et de partage, Morgane aime apprendre et explorer en permanence, découvrir de nouvelles cultures, de nouveaux espaces, de nouvelles façons de réinventer le monde qui nous entoure. Résolument curieuse, elle s’intéresse à des sujets très variés, allant de la culture à l’innovation, en passant par les ressources humaines et l’entrepreneuriat. Ancienne étudiante en histoire du genre, Morgane a toujours porté un regard particulier aux problématiques hommes/femmes. Tombée dans le Web autour d’un (heureux) hasard, la toile s’avère être un fabuleux espace de fouille, de recherche, d’échange et de créativité rendant possible une mutation des genres et des pratiques socio-culturelles. Informer, surprendre, enchanter, créer, co-créer… à l’heure de l’Open source, de l’économie collaborative, le champ des possibles est infiniment grand. Un tantinet aventurière, Morgane aime relever des défis et se dépasser. Avec son projet MétamorFaiseurs, elle est partie à la rencontre d'ambassadeurs du changement dans le monde autour de l'éducation, l'égalité homme/femme et l'environnement et se lance dans la réalisation d'un webdocumentaire. MétamorFaiseurs : un monde en mutation, des Faiseurs en action !